C’est un arbre aux branches élancés
Donnant de beaux fruits arc en ciel,
Seul dans un vallon éclairé
Où reposent les âmes vieilles.
Assis contre son tronc de chair,
Moussu et velouté, j’écoute
Les mots de la Nature -mère,
Qui sourdent comme un goutte à goutte.
Des nuits troublées se sont pendues,
Ainsi que d’insensés jours sombres
Au bout du fil du temps perdu.
Ancêtres, je vois vos frêles ombres,
Voûtées, derrière la charrue.
Les droits sillons de morne brume,
La fougue jadis disparue,
Effacés d’un frisson de plume.
Aïeuls, je perçois vos soupirs,
Ameublissant l’épaisse terre.
J’entends vos clairs frivoles rires,
Ivres de doux rêves de mer.
Cet arbre noble dans ce val,
N’est-il pas la proue d’un vaisseau,
Un arche où le bien et le mal
S’embrassent dans un même berceau ?
Éden, enfer sont des destins
Semblables pour les oripeaux,
Figés par un glacial dessein.
Tout est brutal sans vitale eau.
C’est un bel écrin de verdure,
Où les gazouillis des graciles
Oiseaux s’accordent aux vifs murmures.
Des mânes encore très habiles.
Masqués de larges feuilles rousses,
Entre les jets de lueur blanche.
Une ruine, bâchée de mousse
Gît dans une tombe de branches.
Je perçois les esprits malins,
Comme des vilains serpents fluides
Ondulant dans l’air du matin,
Trouant d’une clarté la bruine
De ce lieu, l’envers est perçu.
Du passé est né une merveille
Pour la joie de l’âme et la vue.
Il suscite l’ardeur et l’éveil.
Allongé, mon corps alangui
Vibrant sur le sol écumant ,
Recueilli, tel un vieux yogi
Serein dans sa méditation.
Je ne demande rien d’autre à la Nature
Que de me bercer de ses doux murmures
De m’embaumer de ses parfums de fleur
Et de me cajoler de son air et de sa chaleur.
Je désire marcher dans les profondes forêts
Et me couvrir de leur ombre les jours d’été
Entendre les oiseaux chanter leur joie de vivre,
Le ruisseau qui sinue tel une couleuvre ivre.
Boire à son eau fraîche et sourire de béatitude.
Je veux que mes yeux prennent l’habitude
De ne voir que la beauté des paysages infinis
Où monts et vaux caracolent en pleine harmonie.
Je ne demande rien d’autre à la Nature
Que d’accompagner mes nuits obscures
De la litanie de la chouette et du coucou,
Mêlant leurs cris au souffle du vent debout.
Je veux nager dans la mer immensément bleue,
Et me perdre, pieds nus, sur ses rivages sableux,
Écouter les mouettes rire qui pirouettent dans le ciel
Me tapir dans les chaudes dunes, me vivifier au soleil.
Gravir les montagnes par les sentiers lumineux
Respirer son air et remplir doucement mes yeux
De larmes et d’extase pour que naisse la foi
En la bonté des choses de la vie, qui nous choient
Je ne demande rien d’autre à la Nature
Que de me montrer la voie de l' aventure
Qui mène au bonheur d’être entre son sein
Et m’exalter toujours de son magique dessein.
Dans le ciel azur vole un papillon
Arc-en-ciel, cherchant sa destination.
Il zigzague dans l’air épaisse d’un jour
D’été, espérant une rencontre glamour.
Une papillonne aux ailes bleues et roses,
Butinant une longue gentiane jaune éclose
Le voit et détourne les yeux. « Quel bâtard
Et trouble fête. J’aime tant sucer mon nectar. »
« Toi, la môme, tu te prends pour une vedette.
Regardes et admires mes dons de poètes.
Un looping par ci, un grand huit par là.
Viens avec moi, je t’emmène dans mon lilas. »
La bêcheuse hésite un moment, puis deux,
Battant les ailes, se laisse prendre au jeu.
Le gaillard fanfaronne, ne cachant pas sa joie,
La prend sous son aile et lui montre la voie.
Dans l’étendue pourpre du crépuscule nonchalant,
Déambulent les deux âmes, emportés par le vent.
Elles viennent se poser sur une fleur de lilas mauve,
Trompe contre trompe, se blottissant dans une alcôve.
Il était une fois
Dans un pays lointain
Un sombre roi.
Remettant toujours au lendemain
Les décisions et l’amour
La reine partit en chemin
Fatiguée de compter les jours
Elle rencontra un gentilhomme
A qui elle se confia à voix basse
Lui parlant du royaume
Avec beaucoup d’audace
Les murs ont des oreilles
La rumeur vint jusqu’au roi
Qui de colère vida une bouteille
Ivre, brandit le livre de la loi
Et répudia la reine.
Oubliant qu’elle s’appelait Gaïa
Depuis, les arbres et les fleurs en peine
Périrent dans l’immédiat.
Le royaume devint sans vie.
Les animaux et la lumière le fuirent
Car tout allait de pis en pis
Le roi charma Gaïa pour la séduire
Un sourire, un geste tendre
Gaïa lui dit que son amour
Sur la Terre est à répandre
Pour que reviennent les jours.
Le roi aussitôt comprit
Que le pouvoir et le savoir
Sont au service de la Vie
Et c’est à son eau qu’il faut boire.
Je tiens dans ma main une jolie mirabelle,
Tandis que dans le ciel, le vol des hirondelles
Strie le ciel bleue d’une apaisante candeur,
Assis à l’ombre de son arbre bienfaiteur.
Savourer ce fruit les yeux fermés, le cœur
Ouvert et sentir le parfum des milles fleurs,
Que butinent gaiement les abeilles en chantant,
Est un bonheur si naturel qu’il en est exaltant.
Vivre cet instant, détaché de tout, n’être rien
Qu’une âme que le vent caresse telle une main
Exquise et sensible, avec grâce, légèreté, puis jouir
Dans la douceur d’un insensé instant de plaisir.
Nature, j’ai marché longuement sur ton dos,
Entre tes arbres, sur tes roches et tes prairies.
j’ai prié les dieux pour que ne cesse ce saut
Dans l’inexploré, voyage épique et folle rêverie.
J’ai respiré ton air, bu de ton eau, admiré ton ciel
Et tes paysages. J’ai ri d’amour à tes ardents étés ,
Pleuré d’émerveillement aux couleurs plurielles,
De tes automnes et tremblé à tes hivers glacés.
Et quand viennent tes printemps, les arômes aériens
Des fleurs que caressent le vent, à mon corps propices
Tel un nouveau-né, je me nourris joyeux à ton sein,
Sous ton soleil créateur. Nature, ma mère, ma nourrice.
J’entends le loup au fond du Diois
Il erre à la recherche de sa proie
Un chevreuil, un sanglier, une brebis
Berger, je sais que cela t’ennuie
Ta colère contre le loup n’est pas feinte
Et j’entends aussi ta longue plainte
Le loup carnassier hante tes nuits
C’est le prix à payer pour que la Vie
Continue et se perpétue selon la loi
De la Nature. Entends aussi sa voix !
Ne pas être seul à payer ce prix
Devrait être par tous, compris.
Voilà une bonne et juste requête
Une entente, mieux que la contrainte.
La fourmi , ayant travaillé
Tout l’été,
Se trouva fort fourbu
Quand la bise fut venue
Pas un seul petit morceau
De rengaine pour son repos.
Elle alla prier Jeannine
La cigale sa voisine
l'implorant de lui chanter
Quelques berceuses pour pioncer
Jusqu’à la saison nouvelle.
Je vous paierai, lui dit-elle
Avant l’août, foi d’animal,
Intérêt et principal.
La cigale est généreuse
C’est là sa propre loi.
Que faisiez vous au temps de joie ?
Dit-elle à cette travailleuse
-Nuit et jour à tout venant
Je bossais, ne vous en déplaise
Vous bossiez ? j’en suis fort aise.
Et bien ! Dormez maintenant.
Dans l’éclatante lumière du blanc soleil,
Tu danses et virevoltes, belle petite abeille.
Le pollen et le nectar des exquises fleurs
Que tu butines continûment à toute heure.
Sont amenés à la ruche sur la colline
Ou tu rejoins tes sœurs lorsque le jour décline.
Avec un peu de venin et de savoir-faire,
Le bon nectar se transformera en miel clair
Ou foncé, afin de nourrir la colonie
D’abeilles, toutes agissantes en pleine harmonie.
Toi, l’enfant, la femme, l’homme, ouvre tes yeux,
Goûte l’exemple de cet essaim élogieux,
Admirable, solidaire accomplissant
Sa charge répétée, sans plainte avec allant.
La pluie murmure dans le feuillage
Des arbres en paix bénissant les nuages
De leur affection, tel cet hêtre solitaire,
Qui me couvre d’amour et de lumière.
Pour ta tendre sérénité, en ces temps sombres,
je te remercie, grand arbre, et pour ton ombre
Vaste et pacifique. Je te rends grâce, bel hêtre
Pour la douceur que tu donnes à mon bien-être.
D’un grand chagrin est né l’amour de la nature
Qui toujours console par ses vertes parures,
Les mélopées des oiseaux, la plainte du vent
Le murmure des arbres, son doux pépiement.
Le soleil est d’or. Il agrémente sans bruit
L’errant, l’affligé, l’ému, plombé par l’ennui.
Le voilà vagabond sur les sentiers ailés,
L’âme dont la peine est réduite à chaque foulée